Davos

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Anasteria grimaça en observant la pluie diluvienne à travers la fenêtre. Après une nuit horrible entrecoupée de cauchemars, elle ne parvenait même pas à trouver appétit. Elle bâilla une énième fois et croisa ses bras sur la table, avant d’y enfouir sa tête et se préserver du brouhaha de la taverne. Mais son répit fut de courte durée.

 

— Bon, le temps ne s’améliore pas, soupira Zèfir. Mais on va malgré tout essayer de rejoindre la grande voie. Je suis persuadé que là-bas, on trouvera une carriole pour aller à l’académie.

 

Anasteria entendit clairement le grognement désapprobateur de Johan.

 

— Vraiment ? Je croyais qu’il faisait tout le temps beau en Ignis ! Pourquoi n’attendons-nous pas la fin de ce déluge ?

 

Anasteria trouva enfin le courage de relever la tête. Zèfir ne répondit pas tout de suite. Depuis leur réveil, le magistère paraissait inquiet, et clairement ailleurs. Lui qui depuis le début de leur rencontre semblait jeune et insouciant, voire maladroit, s’était mué en une tout autre personne. Il voulait désormais arriver le plus rapidement possible à la capitale.

 

— Ce n’est pas raisonnable.

— Enfin, regardez Anasteria, elle a l’air crevée !

 

Zèfir posa son regard sur l’adolescente qui grimaça. Elle n’avait pas encore mentionné les détails de sa nuit agitée au magistère. Ce dernier fronça les sourcils avec inquiétude.

 

— Tu as mal dormi ?

— J’ai… J’ai eu des cauchemars. Rien de grave.

— Le Patriarche ?

 

Anasteria hocha doucement de la tête.

 

— Ryse m’a dit que c’était normal.

— Oui, moi aussi j’en ai eu, raison de plus pour continuer.

 

Anasteria soupira bruyamment. Bien qu’elle comprenait l’enjeu, elle ne savait pas si elle serait capable de marcher sous cette pluie, dans la boue, avec si peu de sommeil. Contrairement à Zèfir, elle ne pouvait pas fusionner avec Ryse pour repousser ce déluge avec sa chaleur.

 

— Est-ce qu’on peut attendre midi ? proposa Anasteria. Je voudrais juste essayer de récupérer, et voir si la pluie cesse un peu. Si elle continue… Je ferais un effort, mais j’ai vraiment besoin de sommeil, Magistère Toscan.

 

Elle pouvait sentir le regard de ses amis se poser sur elle. Elle n’avait pas vraiment eu envie de leur raconter les détails à eux aussi, et ce malgré l’insistance d’Ivona. Elle ne voulait pas vraiment leur expliquer qu’elle avait vu leurs morts, et celle de tous les gens qu’elle aimait. Finalement, Zèfir lâcha un soupir avant de gratter nerveusement ses cheveux sombres.

 

— Je vais demander à l’aubergiste pour garder un peu plus longtemps la chambre.

 

Certes, le groupe prenait du retard, mais Anasteria n’avait jamais autant savouré une sieste. Les cauchemars semblaient l’avoir laissé tranquille un instant, tandis que ses amis et Zèfir passaient le temps comme tant d’autres voyageurs coincés dans la taverne. Quelques heures plus tard, lorsqu’elle retrouva tout le monde à l’heure du déjeuner, tous étaient obligés de constater que la pluie n’avait guère cessé, ou baisser en intensité. Soucieux, le magistère n’avait pas rejoint les adolescents et discutait depuis déjà plusieurs minutes avec le tavernier dans l’espoir de trouver une solution pour rallier la capitale. D’après les dernières informations, l’averse était telle que les chemins pour atteindre les grands axes étaient devenus complètement impraticables. Après quelques bâillements, Anasteria se concentra sur sa soupe fumante, même si elle ne pouvait détourner les yeux de Zèfir et de sa discussion.

 

— Tu te sens mieux, Ana ? demanda Johan.

— Un peu. Je suis quand même épuisée. J’ai l’impression qu’on a drainé mes forces. Et je serais plus tranquille quand on sera arrivé.

 

Elle jeta un bref coup d’œil à Ryse qui demeurait étrangement calme et fixait la pluie depuis son réveil. Peut-être que la fatigue d’Anasteria l’affectait aussi. Ou peut-être sentait-il quelque chose.

 

— Pour ça, la pluie devrait s’arrêter, grommela Johan. J’en peux plus ! Même en Méridie, il fait plus beau.

— C’est la période. Mais en effet, aucune carriole ne passera sur ses routes, soupira Ivona, on va devoir marcher sous la pluie, à moins que Zèfir trouve une solution.

— Génial.

 

La porte de la taverne s’ouvrit dans un fracas qui surprit les quelques habitués du lieu. À leur grande stupeur, les trois adolescents virent Vari se diriger vers Zèfir. Ses vêtements étaient imbibés d’eau, et ses cheveux noirs tombaient devant ses yeux. Derrière lui, Davos entrait à son tour, d’un pas plus mesuré.

 

— Magistère Toscan ! s’exclama Vari. Par chance vous voilà.

 

Zèfir ne partageait pas son enthousiasme. Il se tourna lentement et ses yeux de feu analysèrent Vari en silence. Il esquissa même un mouvement de recul lorsque le professeur s’arrêta près de lui. Mués par une curiosité mutuelle, les adolescents se levèrent et se dirigèrent vers eux. Anasteria avait à peine approché qu’elle sentit le regard sombre de Davos sur elle. À sa droite, Ivona se tendit immédiatement, comme si elle était prête à sauter sur leur ancien ami. Seul Johan lui adressa un sourire teinté de confusion.

 

— Davos ? Professeur Vari ? Qu’est ce que vous faites là ? demanda-t-il.

— Oui, intervint Zèfir. Vous vous trouvez bien loin de l’académie…

— Oui, répondit Vari. Heureusement, la pluie vous a ralenti. J’ai eu peur de vous manquer. C’est Magistère Fe Dixa qui nous envoie.

 

Zèfir ne cacha pas sa surprise.

 

— Masilda ? Qu’est-ce qui se passe ?

— La situation est plus grave qu’on ne le pensait, avoua Vari. Les sombremages sont en nombres, surtout chez les professeurs… On a appris qu’Iselia se trouvait parmi eux…

— Iselia ? s’étonna Johan. C’est… c’est impossible !

 

Anasteria avait elle aussi du mal à croire à cette révélation. Elle ne prétendait pas connaître sa professeure, mais elle avait beaucoup de mal à l’imaginer être responsable de tout ceci. Comment aurait pu être celle qui cause du tort à Anasteria ? Elle n’était visiblement pas la seule à avoir des doutes. Ivona toisait Davos et Vari d’un regard qui n’avait rien à envier à Voxana.

 

— Je sais que c’est surprenant, soupira Vari. Mais c’est la réalité. Masilda est en train d’arrêter tous ceux qui ont participé à ces incidents de près ou de loin. Elle et Voxana ont tout découvert.

— Cela n’explique pas votre présence ici, nota Zèfir.

— Iselia a eu le temps de former un étudiant pour qu’il attaque Anasteria.

 

Un lourd silence suivit sa phrase, mais son regard se planta sur Ivona. Cette dernière esquissa un sourire en coin insolent qui s’élargit lorsque Vari continua.

 

— Masilda m’a demandé de vous stopper, car Ivona est de mèche avec Iselia.

 

Ivona laissa échapper un violent rire incrédule et secoua doucement sa tête.

 

— Je crois que je n’ai jamais rien entendu de plus idiot de toute ma vie, s’amusa-t-elle. Vraiment, Vari ?

— Ne me manque pas de respect, Ivona, menaça Vari. Je suis toujours un professeur de l’académie. Et tout tombe sous le sens. Tu es une mage douée, et tu es assez proche d’Anasteria pour avoir pu l’atteindre si facilement.

 

Zèfir ne disait rien, tout comme Johan et Anasteria qui observait la scène.

 

— Si c’était vraiment le cas, rétorqua Ivona, c’est ma mère qui se trouverait devant moi pour m’arrêter et me filer la correction de ma vie. Pas vous.

 

Ivona esquissa un pas vers Vari et Davos qui se tendirent davantage.

 

— Ce qui est amusant, reprit-elle, c’est que ma mère se méfie beaucoup de Davos, tout comme moi. Et vous voilà tous les deux, avec votre prétexte fumant.

— Masilda ne vous aurait jamais envoyé, intervint Zèfir. Je la connais bien, et je sais comment elle fonctionne. Elle serait venue elle même pour s’assurer de notre sécurité. Et je ne parle même pas de vos accusations concernant Iselia qui me semble… complètement improbable.

 

Vari poussa un long soupir puis il haussa nonchalamment les épaules, et un frisson parcourut l’échine d’Anasteria.

 

— Moi qui voulais régler tout ceci pacifiquement.

 

Les yeux de Vari devinrent aussi sombres que les ténèbres et la paume de sa main heurta la poitrine d’Ivona. L’énergie obscure la propulsa sur plusieurs mètres, et elle termina sa course contre une table un peu plus loin. Zèfir se jeta sur le professeur qui esquiva d’un pas en arrière un coup de poing ardant. Sa fusion avait gagné en intensité. Des flammes naissaient aux creux de ses mains, et remontaient le long de ses bras, léchant ainsi sa peau hâlée sans le brûler. La chaleur qui se dégageait de son corps déformait les lignes droites et les couleurs autour de lui. Mais très vite, le chaos s’abattit dans la modeste taverne. D’autres hommes et femmes aux teintes sombres et à l’aura menaçante, entèrent dans la pièce, tandis que les pauvres civils tentaient de fuir. Zèfir devait faire face à de multiples opposants. Il esquivait les attaques avec grâce, et répondait avec des coups de pieds et de poings qui crée de puissantes flammes. Il avait si fort à faire qu’il ne pouvait pas s’occuper des étudiants.

 

Un peu plus loin, Davos vit dans ce chaos l’occasion qu’il guettait depuis de longues semaines. Une aura sombre l’entoura et il hurla de douleur pour la contenir, avant de se jeter sur Ivona. Heureusement, l’adolescente se redressa rapidement et attrapa une fiole de préparation. Elle créa un bouclier juste à temps pour parer le coup de poing ténébreux de Davos. Anasteria en profita pour lui assener un violent coup de pied dans les côtes, ce qui le fit reculer de plusieurs pas.

 

— N’essaye même pas de la toucher, Davos, menaça Anasteria.

 

Davos lâcha un rire. Son visage était déformé par un rictus malsain qui donnait des sueurs froides à Anasteria. Quelque chose n’allait pas chez lui. Anasteria sentait ses yeux devenir flamboyants sans son accord, et elle pouvait voir l’aura de l’ombre qui siégeait désormais dans son ancien ami.

 

Tu auras besoin de ça.

 

Une chaleur enveloppa sa main et l’épée de feu se matérialisa devant ses yeux. Elle se mit en garde, mais Davos ne semblait clairement pas la prendre au sérieux. Derrière elle, Johan restait un peu en retrait, avec une préparation que lui avait fournie Ivona. Il regardait, incrédule, son ancien colocataire qui n’en finissait plus de rire.

 

— N’essaye pas de jouer les héroïnes, Ana, siffla Davos. Tout ce que tu touches finit par disparaître.

— Comment oses-tu ? intervint Johan. Tu… C’était toi ? Tu es le responsable de la mort de Laurène !

— Je n’ai rien fait ! Je… Je ne suis pas celui qui a ouvert la faille et emmené Anasteria… Mais si Laurène ne s’était pas trouvée avec elle.

— Tu me dégoûtes, siffla Johan. C’est toi qui as invoqué le cauchemar ? Les licheurs ? Et tout ça pour quoi ? Tu as fait prendre à ta sœur des risques inconsidérés pour… devenir un sombremage ?

— Pour le pouvoir !

 

Sur ces mots, l’aura gagna un peu plus en intensité, mais aucun des adolescents ne recula.

 

— Je voulais contrôler un cauchemar pour rejoindre les sombremages, et posséder son pouvoir, reprit Davos. Mais chaque fois que j’essayais de devenir plus fort, vous vous mettiez en travers de mon chemin ! Mais maintenant, c’est terminé. Vous êtes encore avec vos pathétiques préparations tandis que moi je suis plus grand, et plus puissant que vous ne pourrez jamais l’être avec vos simples esprits. Même toi Eis, tu ne peux me battre.

— Tu as vraiment un problème d’égo, siffla Ivona.

— C’est toi qui me dis ça… Je vais montrer devant tout le monde que le fils De Vila vaut mieux que l’héritière Eis et —

 

Davos esquissa un pic de glace de justesse et son sourire carnassier s’intensifia.

 

— Arrête de t’écouter parler, lâcha Ivona. Et viens prendre ta raclée.

 

Davos n’hésita pas un instant, et il se lança à l’assaut de ses anciens amis. Le contraste entre le Davos qu’il connaissait, et celui-ci était saisissant. Il ne ressentait plus aucune incertitude ni aucun tremblement quand il envoyait un sort. La magie destructrice des ténèbres semblait le drapé d’un voile qui lui donnait une confiance nouvelle. Ou peut-être avait-il toujours eu une affinité avec cette magie, au contraire de celle créatrice. Toujours est-il qu’Anasteria peinait à contrer les attaques de Davos. Les ombres se prolongeaient le long de ses bras, lui donnant une portée si impressionnante qu’elle ne pouvait pas vraiment l’approcher. Et même si la coordination entre elle et ses amis avait atteint un nouveau palier, ils n’arrivaient pas à prendre le dessus. Anasteria fut frappée en pleine poitrine par une décharge d’énergie sombre, et s’écrasa contre une table. Elle grommela de douleur, et peina à se relever.

 

Il est puissant pour un jeune. Sois prudente.

 

Anasteria fronça les sourcils et observa Davos. Il parvint à contrer le sort de Johan, un rocher qui disparut dans les ténèbres, puis Davos envoya son colocataire contre un mur de la taverne. Anasteria serra sa poigne contre l’épée de feu qu’elle tenait. Comment pouvait-elle combattre quelqu’un qu’elle avait côtoyé ? Sa relation avec Davos n’avait jamais été parfaite, loin de là. Mais elle ne pouvait pas nier et oublier les bons moments passés ensemble. Elle ne pouvait pas se battre contre lui. Et elle pouvait aussi sentir l’hésitation chez Johan. Il avait posé un genou à terre, et observé son ancien ami avec une grimace de douleur. La seule qui ne semblait pas avoir de problème fut bien évidemment Ivona. Son visage montrait toute sa détermination, et les poudres de préparations flottaient autour d’elle, avant de se transformer entre pics de glaces mortelles. Et même si Davos souriait, et que ses ténèbres parvenaient à engloutir sa magie, Anasteria savait qu’elle lui donnait du fil à retordre. Un fouet d’ombre essaya de l’atteindre et Ivona réalisa un nouveau bouclier. Cependant, la force de l’impact la fit reculer de quelques pas.

Anasteria regardait le combat sans pouvoir véritablement agir. Elle ne parvenait pas à comprendre comment Ivona pouvait se battre avec une telle facilité contre leur camarade. Johan se releva finalement, et grinça légèrement des dents. Il attrapa le restant de ses fioles, et Anasteria réalisa qu’il était lui aussi décidé à arrêter Davos. Il concentra sa magie, profitant du duel entre Ivona et Davos pour gagner un peu de répit. Anasteria ne pouvait pas rester immobile. Même si cela la tuait de devoir combattre Davos, elle ne pouvait pas le laisser se battre contre Ivona et Johan. Elle inspira profondément, et attrapa une fiole de préparation. La brisant dans sa main brûlée, elle sentit la poudre réagir étrangement, mais la magie se concentra fortement au creux de sa paume. Elle tendit son bras, et une boule de feu se dirigea vers Davos.

L’attaque le surprit, mais il parvint à la parer avec ses ténèbres. Mais lorsque l’énergie de feu se dissipa, Anasteria surgit derrière. Elle tenta de rapides coups d’épée, mais Davos esquivait toujours. Cependant, il reculait de plus en plus, et désormais, il reportait toute son attention sur Anasteria.

 

— Johan.

 

Anasteria ne se retourna pas lorsqu’Ivona appela leur ami. Elle pouvait deviner une quantité considérable d’énergie derrière elle et elle savait qu’ils avaient un plan. Elle ignora la douleur créée par les lacérations des ténèbres, et continuait ses assauts, entrecoupés de rapides sorts mineurs. Et enfin, elle la sentit, l’accumulation des deux énergies d’Ivona et Johan. Davos le réalisa aussi, mais c’était trop tard. Anasteria recula d’un bond et du sol jaillirent deux pièges magiques. Le pied droit de Davos se retrouva pris dans une glace translucide et épaisse, le gauche dans un sarcophage de terre. Davos tenta de dégager ses pieds, mais sans succès.

 

— Ana ! hurla Ivona. Maintenant.

 

Ses deux mains se posèrent sur la garde de son épée, et elle arma son coup. Puis elle décrit un parfait arc de cercle, rapide et précis. Mais qui s’arrêta à un millimètre de la gorge de Davos. Un chevalier-mage a le droit de tuer un sombremage, et pourtant, elle ne pouvait se résoudre. Sa lame tremblait, et elle fixait le regard sombre et amusé de Davos.

 

— Tu es faible, Anasteria, siffla-t-il. Tu refuses de me tuer ?

— Tu as perdu, répondit-elle. Tu vas aller en prison.

— Tu rêves.

 

Anasteria ne vit pas le coup arrivé à sa droite, et fut frappée de plein fouet par de l’énergie noire. Dans le chaos, elle avait complètement oublié que Davos n’était pas le seul sombremage. Vari se tenait à côté de lui, haletant, et brûlé à divers endroits. Un peu plus loin, Zèfir semblait lui aussi au bout de ses forces, mais de nombreux autres sombremages restaient inertes au sol. Le magistère grimaça, et tendit son bras en flamme vers l’ancien professeur. Ce dernier ne perdit pas un instant, et brisa la glace et la terre qui retenait captif Davos. Et en un éclair, une masse d’énergie noire les enveloppa, et ils disparurent.

Le silence qui s’installa devint aussitôt lourd. Anasteria accepta la main de Johan pour se relever, et grimaça en sentant tous les bleus qui commencer à apparaître sur son corps. Zèfir s’approcha rapidement d’eux, mais Anasteria ne manqua pas le regard sévère d’Ivona sur elle.

 

— Vous allez bien ? demanda Zèfir. Est-ce que vous êtes blessés ?

— Oui, on va bien, lui assura Anasteria.

 

Ses deux amis hochèrent silencieusement de la tête, et Anasteria jeta un coup d’œil à Ivona qui affichait toujours une expression étrange. Soudain, la porte de la taverne s’ouvrit dans un fracas, et Masilda entra, suivi de près de Voxana et Iselia. La magistère observa les alentours avant de se rapprocher d’un pas rapide vers Zèfir.

 

— Loué soit Aulus, lâcha-t-elle. Vous n’avez rien.

— Où se trouve Vari ? demanda promptement Iselia.

— Il a disparu, répondit Zèfir, avec Davos De Vila.

 

Le magistère regarda les corps inertes des autres sombremages.

 

— Certains d’entre eux sont encore en vie. On pourra les interroger.

— Et les enfermer, ajouta Masilda. Ils sont trop dangereux.

— Comment avez-vous su ? demanda Zèfir.

— Vari m’a attaqué, expliqua Iselia. Lui et Davos discutaient avec une troisième personne dans une des salles désaffectées de l’académie. Elle semblait jeune, même si je ne l’ai pas aperçu. Elle a pu leur parler grâce à une projection.

— C’est sans doute Emely, siffla Anasteria.

— Quand Iselia est venue nous trouver, on a essayé de les arrêter, avec Voxana. Mais… Je ne me doutais pas que l’académie comptait à ce point des sombremages dans son rang.

— On va devoir aussi vérifier le Collège, conseilla Voxana. Je pense que Davos n’est pas le seul De Vila à user de la magie sombre. J’imagine que son père fut le premier à l’initier. Je vois mal comment il aurait pu nous passer entre nos doigts autrement.

 

Masilda soupira longuement, et échangea un regard avec Iselia.

 

— Zèfir, tu devrais continuer ta route avec nos aspirants. Iselia va t’accompagner. Je m’occupe de tout ici, et pour ton transfert, Iselia. On va ramener ceux qui respirent encore à l’archipel brisé. Je n’aime pas beaucoup cette histoire.

 

Personne ne l’aimait. Anasteria laissa échapper un bruyant soupir. Elle sentait sa brûlure lui picoter la peau, et elle serra son poing. Décidément, elle ne pouvait pas faire un pas sans avoir de problèmes. Et maintenant, Davos se trouvait dans la nature, et désirait la tuer. Dans tout ce chaos, la lumière se trouvait être Zèfir. Anasteria voulait croire en ses paroles, et maîtriser ses pouvoirs. Elle s’accrochait à cet espoir et ne voulait pas penser à cette situation afin de ne pas être submergée. La main de Zèfir sur son épaule la tira de ses démons.

 

— Ne trainons pas.

 

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